lundi 2 mai 2016

La plume enfin reprise...


Après avoir mis mes projets poétiques en pause pendant plusieurs mois durant, je vous annonce enfin la reprise de l'un d'entre eux depuis quelques jours. Il s'agit d'un long poème, ou plutôt d'une histoire poétique, en vers (alexandrins) sur le thème du Progrès, que j'avais entamé précisément le 4 juillet 2015 en pleine canicule et peu après mon installation dans la ville des Lumière. Actuellement, je travaille sur la troisième (et dernière) partie, laquelle est déjà pas mal avancée (la suite à écrire s'annonce plutôt difficile mais passionnante !). Afin de vous présenter un peu ce poème, voici un petit résumé sans aucune prétention d'exhaustivité : une sorte d'épopée humaine qui s'articule autour de l'effort incessant que l'on exprime en vue de s'acheminer le plus loin possible dans les hauteurs de la montagne du Progrès, d'où on a laissé naître et grandir derrière nous une Ombre à ce qu'on y accomplit jour après jour. Une Ombre qui nous poursuit jusque dans l'effort-même d'œuvrer pour la chasser de notre Empire et qui semble vouloir nous coller à la peau, comme si l'on était à la fois ses parents - responsables d'elle malgré nous - et les acteurs du Progrès dans lequel elle croît. C'est ainsi qu'au sommet de la montagne où l'on parviendra, le déclin de la Terre, orchestré dans l'Ombre de notre Empire, aboutira à l'abandon de la planète, qu'on quittera pour de lointains cieux. Mais, n'ayant ainsi plus aucun sol à élever, cette Ombre nous suivra-t-elle aux confins de l'Univers ? Mystère...

Ma poésie : Mémoire de la Terre : Enfer et Paradis


Voici l'un de mes vieux et modestes poèmes d'il y a bien 5 ans sur un thème récurrent de ma poésie : le rapport de l'Homme à la Nature (entremêlé de spiritualité). Il est inclus dans mon premier recueil, 'Décors au creux des Airs', et c'est avec un grand plaisir que je tiens à le partager ici avec vous. Le voici...


MÉMOIRE DE LA TERRE : ENFER ET PARADIS

Je me souviens du Paradis
Lorsque j’étais à la Terre,
Où Dieu, à son départ, a dit :
« Si Je dois pour vous Me taire,
Animaux contre-nature,
C’est qu’il est en Mon grand projet
De rompre Ma dictature
Et de vous prendre pour sujets
Dans une expérience hardie :
Celle de votre liberté
Où le divin a déserté
Et où seront ablafardies
Les lumières de vos âmes
En proie aux ombres infâmes.
Puissent-elles encore diriger
Toutes vos actions vers le Bien
Pour continuer d’ériger
Un monde qui restera Mien ! »

C’était un lieu où l’Homme était aux êtres lié
Dans l’intimité d’un pieux amour oublié ;
Et c’est ainsi qu’il prenait d’eux le plus grand soin,
Non pas sous le joug d’un devoir mais par besoin ;
Et c’est ainsi qu’ils lui rendaient grâce en retour,
Le comblant de bien-être et de paix chaque jour.

C’était un lieu où l’Homme à lui laissait venir
Les murmures des êtres, échos de l’à-venir ;
Et c’est ainsi qu’il portait d’eux un message :
« Écoute, ouvre-toi et permets le passage ! » ;
Et c’est ainsi qu’ils étaient comme les rayons
D’un soleil qui éclairent l’acte et le crayon.

Je me souviens de l’Enfer
Lorsque j’étais à la Terre,
Où Satan, de Son trône en fer,
A dit : « Est venue mon ère,
Animaux contre-nature ;
Celle de la domination.
C’est une grande aventure
- Dont Je suis l’abomination -
Qui a pour vous bien commencé.
Changez la Nature en produits !
Faites-en un objet d’esprit !
N’ayez donc pas peur d’avancer :
Vous pouvez tant vous permettre,
De la Terre comme maîtres !
Que les ombres de vos âmes
Vous abritent bien du soleil
Qui vous aveugle à ma trame
Au sortir de votre sommeil ! »

C’était un lieu où l’Homme avait défiguré
Le spectre à la Nature, à si peu l’augurer ;
Et c’est ainsi qu’il engendrait l’artificiel,
Sous la sainte désertification du Ciel ;
Et c’est ainsi qu’à lui changeaient d’existence
Les êtres, en passant de la Nature aux sciences.

C’était un lieu où l’Homme était fait esclave
Du spectre d’un techno-monde, son enclave ;
Et c’est ainsi qu’il perdait tout le contrôle
Sur le sens des actions par où il jouait un rôle ;
Et c’est ainsi qu’au prix de ce grand sacrifice,
Il régnait sur les êtres loin du sacré fils.

Je suis, des êtres réunis
De la Terre, la Mémoire
Qui s’écoule vers l’infini
Dans les pages de l’Histoire.
Et le grand livre de l’Homme
Se referme à lui à présent
Pour qu’il ouvre un nouveau tome
À cette histoire et tous ces ans.
L’Homme, en effet, ayant eu peur
De sa tombée de conscience
Dans le puits sans fond des sciences,
Va, maintenant, avec stupeur,
Assister sous ses millions d’yeux,
Sur la Terre, au retour de Dieu :
« Homme ! Tu es allé au bout
De Mon projet d’expérience !
Vois-tu enfin comme il est fou
De fuir les saintes croyances ? »

© Cédric Rochelet, 2015, Extrait de 'Décors aux creux des Airs'